Pierre-Philippe Cormeraie, aka@PPC sur Twitter, n’est pas un CDO comme les autres. Nom de code : « Chief Digital Evangelist » au sein du groupe bancaire BPCE. Alors pourquoi « Evangelist » ? Tout simplement parce qu’il s’agit de faire rayonner le digital partout dans l’entreprise. Lumière !
Vous avez choisi le terme évangélisation, en quoi fait-il sens aujourd’hui dans votre réflexion sur la transformation digitale ?
Pierre-Philippe Cormeraie : Digital Evangelist est un rôle encore récent dans la banque et l’assurance. C’est un métier déjà éprouvé dans la tech, qui a contribué au développement des acteurs, car facilitateur de l’appropriation des nouvelles technologies. Mon job consiste à soutenir et faire rayonner le plan de transformation digitale du Groupe BPCE, 2ème groupe bancaire en France, au sein des écosystèmes digitaux. Une facette de mon activité réside dans des interventions autour des sujets propres à notre transformation digitale, en soutien au formidable travail de transformation mis en place par chacun des Digital Champions au sein des 14 Banques Populaires et des 15 Caisses d’Épargne. Les Digital Champions ? Ce sont plus de 40 collaborateurs issus de toutes les entités du groupe, qui pilotent la transformation digitale dans leur établissement.
Je suis aussi présent et j’interviens comme conférencier dans de nombreux événements externes pour contribuer à la visibilité du groupe en France et à l’étranger. Cela constitue autant d’occasions de rencontrer les acteurs clés de l’écosystème digital et de contribuer à notre ambition de proposer des services digitaux de références pour nos clients, nos collaborateurs et nos partenaires.
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Enfin, je pilote la démarche Open Data du Groupe BPCE. Nous sommes le premier groupe bancaire français à mettre à disposition des jeux de données publiques des entreprises du Groupe BPCE pour accélérer la création de valeur et les usages. Cette démarche est un des exemples du rôle de l’évangéliste. Elle permet en interne d’échanger avec les différentes directions du Groupe, d’expliquer ce qu’est l’Open Data, de fédérer une communauté de producteurs de jeux de données publiques. A l’externe, il s’agit de faire connaître ce que l’on propose et de travailler avec d’autres acteurs de l’écosystème de l’Open Data en France pour générer de la valeur.
Acculturer et évangéliser, quelles différences ?
PPC : L’acculturation est l’un des piliers de l’évangélisation. Évangéliser c’est faire rayonner la stratégie digitale de l’entreprise à l’extérieur et à l’intérieur pour permettre à chacun de se l’approprier et de la partager auprès du plus grand nombre. Il s’agit aussi de partager les clés de compréhension propres aux changements de modèles, aux changements rendus possibles par les opportunités technologiques. C’est aussi faire tomber les peurs légitimes face aux nouveautés technologiques pour permettre à chacun de se sentir à l’aise avec les enjeux propres à la transformation, et se saisir des opportunités digitales pour exercer avec efficience, intérêt et plaisir son cœur de métier.
« Évangéliser », le terme a une connotation religieuse, le digital est-il une nouvelle religion ?
PPC : Le digital est une nouvelle révolution industrielle, sociétale, entrepreneuriale. Les champs des possibles offerts par les nouvelles technologies permettent à tous de revisiter sa propre chaîne de valeur. Cela permet aussi à chacun de revisiter sa proposition de valeur avec de nouveaux outils et process pour distribuer son offre auprès de ses clients ou utilisateurs, pour réenchanter la relation, pour revisiter ses process et ses outils, pour développer des relations de travail avec des partenaires. Chacun peut ainsi contribuer et agir à son échelle. L’évangélisation a pour objectif d’aider à dépasser la technologie pour permettre de mieux l’utiliser.
« Évangéliser » les collaborateurs au digital, concrètement, comment ça se passe ? Combien de temps faut-il ? Quelles sont les étapes nécessaires ?
PPC : Légitimité, temps d’écoute, temps de partage d’expériences, temps de démonstration, temps d’explication, mais aussi, bien entendu, temps de démultiplication. Évangéliser se joue sur un temps long. Surtout si l’on veut embarquer le maximum de collaborateurs. Mais évangéliser c’est aussi simplifier, rendre lisible et compréhensible ce monde qui bouge vite. Et c’est bien entendu favoriser l’appropriation par chacun. Donner matière à réfléchir plutôt qu’essayer de convaincre. En résumé, évangéliser à cette ère du digital, c’est conjuguer les bons outils avec les bonnes pratiques, le bon sens, et faire passer les relations humaines tout en amont des aspects technologiques.
Qui sont les acteurs de l’évangélisation ?
PPC : Les critères de mesure d’aujourd’hui sont majoritairement l’usage et le NPS (Net Promoter Score, le score de recommandation). Le rôle du manager évolue, de nouveaux métiers sont présents chez nous. Product Owners, UX Designers, Tech leads, Customer Journey Owners, Data Scientists, Scrum Masters… ces nouveaux métiers cohabitent dorénavant avec les métiers historiques pour générer ensemble plus de valeur pour les utilisateurs clients ou collaborateurs.
Les « Makers » sont les nouveaux sachants. Nous sommes aussi entrés dans l’ère du management coach, du management en mode leader plus qu’en mode chef ou directeur. Empowerment, évangélisation et facilitation sont des facteurs de succès dans un monde qui nécessite plus d’agilité, plus de vitesse d’exécution et une bonne connaissance des possibles pour favoriser l’usage. L’évangélisation, c’est aussi ouvrir des champs de réflexion pour imaginer de nouveaux dispositifs, de nouvelles méthodes. Pour améliorer en permanence l’expérience des utilisateurs, nous avons mis en place une véritable démarche de « Self care ».
Quels bénéfices à l’évangélisation pour les entreprises ? Plus d’engagement collaborateurs ?
PPC : Meilleure compréhension des enjeux… plus d’engagement des collaborateurs, plus d’usage, plus d’engagement client, plus d’usage. Le cercle vertueux est trouvé, il s’anime et s’améliore chaque jour et je l’avoue, c’est passionnant.